Plusieurs fois, Raphaël Géminiani a fait équipe avec Louison Bobet. Alors que Raphaël était un optimiste impénitent, Louison était d'un naturel inquiet et se faisait souvent beaucoup de soucis pour l'étape du lendemain. Etant dans la même équipe, Raphaël et Louison partageaient souvent la même chambre à l'hôtel, et la même table après l'étape du jour. Les journalistes mangeaient aussi avec eux.
Pendant un tour de France, Louison Bobet discutait souvent au cours du repas du soir avec Raphaël Géminiani et trouvait mille raisons pour craindre que ses adversaires gagnent de précieuses minutes au classement général :
"Tu vas voir les italiens, ils vont nous faire un barrage ...
Et puis les hollandais vont nous grignoter dans la plaine ... "
- Mais t'en fais pas, répondait Raphaël, je vais t'y mettre un coup de fusil là-dedans !
- Oui, mais dans le col, les espagnols sont de bons grimpeurs ...
- Te fais pas de soucis, Louison, j'y mettrai un coup de fusil !
- Mais le peloton va suivre de prés ...
- Mais j'y mettrai un coup de fusil là-dedans !"
Etc ... et ces dialogues revenaient régulièrement tout au long du Tour.
Or un jour l'action de Raphaël Géminiani dans le peloton a permis non seulement à Louison Bobet de remporter l'étape, mais aussi de faire perdre à ses successeurs immédiats au classement une bonne dizaine de minutes, ce qui n'était plus rattrapable avant l'arrivée à Paris. Le soir, en arrivant au restaurant pour manger avec Raphaël, les autres coureurs et les journalistes, Louison Bobet, heureux d'avoir remporté l'étape et entrevoyant la possibilité de gagner le tour, s'est exclamé en voyant Raphaël :
"Ah, sacré grand coup de fusil, tu nous les as passés par la fenêtre !"
Les journalistes de l'époque l'ont noté et les autres coureurs aussi. Depuis Raphaël Géminiani s'entend souvent appelé : le grand fusil !
Page faite par Samuel GAILLARD, instituteur de la classe de CM2.